"Si l’Ulysse de James Joyce pense que l'Histoire est un cauchemar dont il faut essayer de s’éveiller, cette panique n’a jamais atteint Henri Capdepuy, le Directeur d’exploitation de Fertiladour, qui, lorsque ce problème est porté sur la place publique, s’étrangle de colère et hurle à qui veut l’entendre qu’il faut « faire preuve d'un peu d'objectivité, scientifique, et ne pas laisser la place à la suspicion, ou à la démagogie ». Tu t’appelles Henri, mais, dans tout ce qui suit, je te désignerai par ton nom. Capdepuy. Ce nom que tu partages avec les tiens, qu’ils portent avec une honte que tu vois dans leurs yeux. Qu’ils te reprochent en silence, lèvres fermées. Qu’ils maudissent quand tu viens faire le marché à Boucau avec le sourire, en croisant et saluant des anciens ouvriers en moins bonne santé que toi. Capdepuy. Œil torve envers tes ouvriers qui te craignaient, lancé à tous ceux qui rechignaient à accepter ton discours. Droit dans tes bottes. Qui n’a jamais laissé à personne le soin de nier le dossier. Ton gros cul sur la boite de Pandore et deux poings en forme de masses sur ton bureau. 

"Bien sûr, ces terrains ne peuvent servir qu’à un usage industriel, ce n’est pas à nous de décider, c’est à la Région qui est propriétaire du Port, et à la CCI qui le gère… Mais évidemment, à cause de traces qui sont encore présentes sur ces terrains, je crois que l’on ne peut pas en faire un jardin potager...».
Il fait sourire, le bonhomme, avec ce genre d’expressions. Pourtant, l’histoire est connue de ceux qui rigolent avec lui, et détournent le regard.