La poussière
Extrait
"Yves Santamaria était l’inspecteur de la CRAMA, chargé d’intervenir avant que ne se produisent les accidents du travail, avant les maladies professionnelles qui frapperaient les ouvriers. Pendant 10 ans, à partir de 1990, il rédige près d’une trentaine de rapports sur le taux criminel de poussières dans les ateliers de Fertiladour.
« L'employeur (sauf malhonnêteté avérée de sa part) ne peut objectivement pas dire qu'il ne savait pas où que ce risque était maîtrisé », m’écrit-il Pour certains ouvriers, ça a commencé. Ils crachent une mousse verte, et doivent vivre avec un appareil d’assistance respiratoire 24 heures sur 24. Sous peine de mort immédiate. En 2000, il refait les mesures, et les rapporte dans un dernier rapport. La concentration moyenne de poussières dans l’air a été ramenée de 25 à 3 fois la dose maximale autorisée. Fertiladour est tel un chauffard qui roule 3 fois au-dessus de la vitesse maximale autorisée. Qui traverse les villages à 150 km/h, sans un regard sur les corps qui tombent, qui freine mais ne s’arrête à aucun feu rouge. Dans le domaine de la sécurité routière, on appelle ça un comportement criminel. Dans celui de l’industrie, un fleuron. Yves Santamaria a ses mots à lui : « ce qu’on vécut les ouvriers là-bas, c’est l’enfer. Je ne vois pas d’autre mot : dantesque »."
Sur les 130 ouvriers qui ont travaillé à Fertiladour, que cela soit dans l'atelier Engrais ou l'atelier Minerais, une trentaine d'entre eux a fait l'objet de contrôles de santé renforcés pour des affections pulmonaires.
Ceux qui ont été diagnostiqués comme atteints de "silicose" (maladie sans autre espoir qu'une risquée transplantation cardiaque) sont désormais morts, pour la plupart.
Loin d'être une fatalité, cette affection n'a jamais été circonscrite dans le fonctionnement quotidien de l'usine, et il a fallu l'obstination de l'inspecteur chargé de la prévention des risques, Yves Santamaria, aujourd'hui à la retraite de la CRAMA (Caisse de Retraite et d’Assurances Maladie d’Aquitaine), pour que les rapports incriminant l'industriel soient rendus publiques.
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