Rien à faire devant « l’affaire Fertiladour » (vraiment ?)

12 novembre 2018 – Billet


C’est un peu manichéen, certes. En décidant comme Roberto Saviano cité en exergue de l’ouvrage de « ne pas faire de prisonniers », le livre  « Sans compter les morts » a déterminé trois camps de protagonistes liés à l’histoire de l’ancienne usine Fertiladour, aujourd’hui Timac-Agro, dans le port de Bayonne. 

Les « gentils », les « méchants » et les « imbéciles ».

Face à cette proposition dévoilée depuis un petit mois de « remettre des poings sur les i », ne figurent pas dans cette catégorisation tous ceux qui n’ont pas obligatoirement vu passer l’info, ceux qui ont d’autres chats à fouetter, ceux qui savent ou ne savent pas mais s’en fichent un peu, beaucoup même, au fond.

Les premiers acheteurs du livre sont logiquement proches du premier camp, celui des « gentils ». Pour la plupart d’entre eux, il leur a fallu dépasser leurs peurs de replonger dans des pages de douleurs familiales encore vives, ou de revivre un combat long et rude qui a pu les épuiser, les frustrer. Les ont rejoints ceux qui, sans (tout) connaitre cette histoire, se sont rapprochés du livre, ont brandi des poings d’une même colère, dans une indignation fraternelle.

Il y a quelques jours a été acheté pour la première fois un exemplaire par un proche des « méchants » : il y a là quelque chose de cohérent, de s’approcher (discrètement) de ma machine à claques pour dimensionner la riposte.

Cela n’a pas toujours été facile de les distinguer des précédents mais rien n’est encore venu du camp des « imbéciles ».

Illustration Plonk et Replonk

Au-delà d’entretenir avec persévérance un « flou artistique » sur le dossier, ils sont ainsi désignés du fait de leurs capacités à n’avoir rien fait d’autre que de répéter ce qui devait être répété, en espérant que l’interlocuteur en face d’eux plierait à leurs propagandes, ou n’aurait pas d’arguments contraires.

Mon manque évident de respect pour eux provient de ce qu’ils auraient pu, de ce qu’ils auraient dû faire, pour nous informer, pour les protéger, avec leurs responsabilités d’élus ou de responsables administratifs de la zone portuaire, ou de chargés de missions de prévention de ses activités industrielles.

Ceux-là disposent pourtant de toute la technologie d’informations pour surveiller l’actualité de leurs responsabilités, par les mots clés de Twitter, les alertes Google, ou, plus simplement, par le quotidien Sud Ouest, impératif de lecture chaque matin de tous les décideurs économiques et élus locaux.

Avec l’article du 30 octobre écrit par Pierre Penin, le clan de ceux qui n’ont pas bougé confirme qu’il espère toujours que « cela se tassera », pour reprendre l’expression de l’industriel.

Je ne sais pas vous, mais, de mon côté, voir accolé le mot « honte » à mes responsabilités portuaires pour la CCI ou la Région Nouvelle Aquitaine m’aurait passablement irrité.

Je pense aussi à tous ceux-là, chargés de nous représenter politiquement avec la mention tricolore « Bayonne », « Boucau », « Anglet » et « Tarnos », soit les 4 villes représentées pour la zone portuaire dans le Secrétariat Permanent pour la Prévention des Pollutions et des risques Industriels (SPPI Estuaire de l’Adour).

Même sans ne rien connaitre de l’histoire de Fertiladour, le titre choisi par le journaliste de Sud Ouest aurait pu secouer la quarantaine d’élus de Bayonne (majorité et opposition) qui ont promis avec son Maire Jean-René Etchegaray de « représenter les intérêts de la population« .

A ce jour, un seul élu (de l’opposition) a fait le choix d’en avoir le coeur net, en choisissant de se procurer le livre. Et les autres semblent se satisfaire du label Ville d’Art et d’Histoire rattaché à la ville en particulier pour l’histoire de son Port (enfin, pas toutes, pas celle-ci).

A Boucau, en dehors de l’exemplaire qui a été remis au Maire de la commune, l’apathie constatée de son conseil municipal peut être considérée comme un raccourci peu courtois : « rien à faire de l’affaire », à l’exception d’une élue écologiste de la majorité une nouvelle fois présente sur le front de cette ignominie, depuis son début.

Le samedi 3 novembre, choisissant d’en remettre une petite couche malgré le peu de place rédactionnelle dont ils disposent désormais, les deux correspondants de Boucau pour le journal Sud Ouest ont cherché des mots justes pour interpeler ceux qui nourrissent les silences par leur désintérêt.

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Après un documentaire, une pièce de théâtre par la Compagnie Si et Seulement Si d’Odile Macchi, et donc un livre désormais, comment considérer effectivement qu’il n’y aurait pas une « affaire Fertiladour », et donc, quelque chose à faire….

Faudra-t-il attendre une adaptation de Spielberg avec Tom Hanks dans le rôle du journaliste et avec Brigitte Macron dans celui de l’épouse d’un ouvrier pour que ces messieurs/dames qui sollicitent notre devoir républicain à chaque élection imaginent commencer à s’intéresser au leur…